Qu’est-ce qui crée la magie d'un summer camp ?

Du 4 au 11 août 2019, j’ai participé à la cinquième édition du PIFcamp dans les montagnes slovènes. Ce camp de hacker (PIF vient de « Piflard », neerd ou geek en slovène) rassemble chaque été une soixantaine de participants durant une semaine pour expérimenter et bidouiller en pleine nature. Passage en revue (non-exhaustif) des ingrédients qui créent l’étincelle de ce type de rencontres.

« Piéger » les participants dans un coin de nature

La participation au PIFcamp est obligatoire sur toute la durée du camp ; 6 jours en l’occurrence. On se réveille (presque) tous ensemble, on prend notre petit-déjeuner ensemble, on part en randonnée, on participe à un atelier, on re-mange, on va assister à une performance ou servir de cobaye pour un atelier, on devise devant un feu de camp. L’effet colonie de vacance fonctionne, à fond.
Depuis sa première édition (en 2015), le PIFcamp se déroule au milieu du parc National du Triglav. Deux bâtiments inoccupés en été (une école et un édifice paroissial) servent de camp de base : dortoirs, cuisines, terrasse, grand espace vert, salles permettant de stocker ou de performer, terrain de basket pour cours de yoga improvisés, petite épicerie et café de l’autre côté du mur en pierre.

Des montagnes immenses couvertes de forêts de sapins entourent le camp, et tout près, l’eau transparente et glacée de la rivière Soča appelle au plongeon : le terrain de jeu idéal.

Au bout de la troisième journée, on a tout simplement envie de rester pour toujours. Le reste du monde n’existe plus et les jours restants semblent déjà trop courts pour faire tout ce que l’on a prévu et prendre le temps de rencontrer tout le monde.

Lâcher prise

« Attendez, vous voulez dire que je peux participer à un événement sans avoir à travailler dessus ? Mais euh, même pas un tweet ? Prendre quelques photos ? »

Quand on est habitués à être du côté des organisateurs, passer du côté des participants est une expérience aussi agréable que déroutante. En tant que membre de l’équipe de PiNG depuis 2011, j’ai contribué à l’organisation et à l’animation de cinq éditions du summer camp organisé par l’association : le summerlab. Et même si c’est l’été, que tout le monde est détendu, m’asseoir au milieu d’un groupe et suivre une activité pendant 2h relève (presque) de la fiction. Plus globalement, nous sommes tous tellement conditionnés le reste de l’année à rentabiliser le temps, à devoir se sentir efficaces, que se laisser aller au rythme d’un summer camp nécessite un temps d’adaptation.

Au début, suivant mes réflexes du summerlab, durant lequel j’essaie d’avoir une vision d’ensemble pour faire la documentation et la communication, je voulais suivre tout ce qui se passait. J’ai vite compris que ce serait impossible. Dès le deuxième jour, il a fallu faire un choix cornélien entre participer à un atelier python ou partir en randonnée. Au bout de quelques jours, le « PIFomo » est devenu une blague récurrente entre les participants : participer à quelque chose signifie louper quelque chose d’autre.


En discutant avec Tina et Uros, qui coordonnent le camp, j’en suis arrivé à la conclusion que laisser les choses se faire fait aussi partie des enseignements en tant qu’organisateurs. Comme nous pour le summerlab, ils ont peu à peu relâché la pression qu’ils se mettaient lors des premières éditions.
La question de la documentation est un bon exemple : Tina explique qu’ils ont lâché prise sur ce point, que si les participants souhaitent documenter ils le font mais que cela ne sert à rien de les forcer. Ses paroles font complètement écho avec nos réflexions autour du summerlab où nous avons testé différentes techniques pour faire en sorte que tout le monde documente, pour finalement arriver sur des formats plus légers sur les dernières éditions.

Créer les conditions du faire ensemble

Les summer camps sont de ces événements qui semblent « faciles » à organiser. Néanmoins, réussir à créer l’étincelle, réunir suffisamment de participants mais pas trop, trouver un lieu agréable, fixer la juste quantité de règles collectives et de temps imposés, demande une très bonne connaissance des communautés, une grande finesse dans l’animation et beaucoup beaucoup de temps en préparation.

Artistes, architectes, designers, photographes, makers, musiciens, développeurs, biologistes : c’est ce joyeux mélange de personnes qui crée la richesse et la diversité des projets menés au PIFcamp.
Comme par exemple cette année :
tester un jeu gustatif autour des aliments fermentés,
souder des synthés (beaucoup),
assister à des performances où le son est contrôlé par le rythme du cœur,
fabriquer et mettre en place des éléments conçus pour s’installer dans la nature,
se détoxifier grâce aux plantes sauvages comestibles,
expérimenter les e-textiles sonores,
poursuivre le projet PIFood,
s’initier au yoga,
randonner,
etc !

Ce qui fait la qualité de ce type de rencontre, c’est d’avoir l’espace pour explorer. C’est une respiration, une parenthèse dans un rythme souvent effréné, qui permet de tester sans obligation d’objectifs, d’apprendre de nouvelles choses, de prendre du recul sur ce que l’on fait le reste de l’année, d’aborder ses projets sous des angles différents. La magie du PIFcamp, comme beaucoup de summercamps réside là : prendre le temps, ensemble.
Alors, vous nous rejoignez au summerlab 2020 ?
Mona Jamois
Photos by Katja Goljat
Pour en savoir plus sur le PIFcamp 2019 vous pouvez aller lire les articles de compte-rendus rédigés par Makery  :
PIFcamp, un lab sauvage dans les Alpes Slovènes
Hacking and Hiking in Triglav, Slovenia
Days of DITOxication at PIFcamp, Slovenia
Meet the organisers behind PIFcamp in Slovenia

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