
Pour produire des biens communs et réduire la fracture culturelle. Un article de Benjamin Cadon, directeur de Labomedia.
Culture numérique <=> jardin numérique, vous trouverez peut être l’analogie facile, mais elle est fertile ! On retrouve en effet de plus en plus le vocabulaire propre à l’écologie scientifique dans les discours de « l’innovation numérique », révélant peut-être au passage le caractère « organique » de ces évolutions.
C’est peut-être ce qui rend si difficile le fait de définir ce que l’on entend par « culture numérique ». On peut au moins estimer que ces cultures (car il faut plutôt l’accorder au pluriel), englobent à la fois les productions culturelles traditionnelles (musique, films, livres), dont la « consommation » a grandement évolué avec le développement d’Internet et du haut débit, mais aussi comprennent des créations artistiques qui existent par l’utilisation d’outils numériques dans le processus de création ou de diffusion (le presque antique « NetArt », « L’art numérique », les performances en réseau). Partant de cette entrée, il faut élargir le périmètre de notre jardin de cultures numériques à tout ce qui nourrit notre cerveau en passant notamment par le tuyau Internet et le jeux vidéo, transformant ainsi notre paysage imaginaire, nos interactions sociales, notre appréhension de l’espace et du temps, les blagues que l’on peut se raconter le lendemain matin (voir par exemple la guerre des mèmes entre 4chan et Tumblr).
On peut donc mettre plein de choses dans notre jardin numérique, on s’aperçoit pourtant que chez un certain nombre de nos concitoyens, ce jardin numérique est particulièrement pauvre et peu diverse, remarque que l’on peut également formuler à l’encontre de cette génération née de l’Internet (les « digital natives ») qui pour bon nombre, se cantonnent à la fréquentation des grandes surfaces américaines (facebook et youtube en tête).
La culture numérique, c’est aussi s’intéresser aux dynamiques culturelles et mécanismes techniques pour mieux appréhender les enjeux et problématiques d’une numérisation massive de notre quotidien. Des révélations d’Edward Snowden au mythique « ça imprime pas ! », on s’aperçoit que ce quotidien est peuplé d’interactions avec des ordinateurs qui reposent sur une complexité technologique qui ne peut plus tenir dans le cerveau d’un seul homme, il semble alors pertinent que le plus grand nombre s’intéresse au sens de ces évolutions technologiques et en maîtrise mieux les modalités techniques pour ne pas devenir « esclave » de la machine mais garder au contraire une forme d’autonomie, de distance critique éclairée.
Je vous propose donc de partir cultiver notre jardin numérique et de considérer au passage la place des espaces publiques numériques dans cet « écosystème », en commençant par un petit détour par celui de Labomedia, association culturelle basée à Orléans.
Labomedia, clignote depuis 1999
Les défricheurs
Il existe toute une kyrielle d’initiatives valeureuses autour de la « culture numérique », qu’elles soient portées par des espaces publics numériques, medialabs, médiathèques, hackerspaces, cybersquat, fablabs, centres d’art et centres sociaux, collectifs de citoyens et d’artistes, … .
Ibniz / Viznut
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L’idée selon laquelle le haut débit était désormais dans tous les foyers restant à relativiser, tout comme l’impression qu’avec la simplification technique liée au web 2,0 chacun était à même d’appréhender la complexité du monde auquel cela donnait accès, ces petits et moyens producteurs occupent une place essentielle pour tenter de palier les inégalités culturelles et d’accès aux contenus numériques. L’usage abondant des « téléphones intelligents », l’omniprésence annoncée des objets connectés à Internet, la possibilité de (presque) tout fabriquer et programmer, toutes ces évolutions sont porteuses de nuages tout comme de potentiels rayons de soleils, d’autant plus s’il existe une multiplicité de possibilités pour accompagner de façon désintéressée les usages et usagers dans la direction la plus clairvoyante.
La multiplication des *labs (fablab, medialab, hacklab, livinglab, …) révèlent l’envie et le besoin de se réunir dans un lieu physique pour apprendre et créer ensemble autour de ces *numériques. Favoriser l’émergence de ce type de lieux et contextes ainsi que leur mise en réseau pour aider partages et échanges est certainement de nature à susciter de la diversité, du partage de ressources qui peuvent par la suite, replantées, donner naissance à des fleurs permettant de remonter le bien être de l’humanité de 10 points (par fleur), tout comme à des légumes sapides générateurs de nouvelles formes économiques.
La coopérative mondiale
Il existe dans ce monde sympathique des cultivateurs du bien commun numérique des organisations non gouvernementales qui développent des dynamiques de coopération et d’intelligence collective parfois à l’échelle internationale, un des premiers exemples qui vient en tête est celui de Wikipedia bien sur, mais la production et le partage de ressource existe aussi à plus petite échelle, parfois dans une logique de personne à personne (P2P !), les connaissances se diffusant alors par cercle plus ou moins concentriques.
Jardiland vs Caterpillar
Mangeons du bio !
J’ai peu jusqu’à maintenant évoqué l’intervention directe d’institutions publiques dans cette culture numérique, de l’école en passant par les ministères car il y a aussi dans ces lieux une multiplicité d’initiatives pour certaines florissantes, pour d’autres plus arides. Là aussi une coopération entre une diversité d’acteurs semble fertile, les « petits » pouvant apporter « aux gros » dans une relation symbiotique à équilibrer. Pour compliquer le tableau, il y a parfois des défricheurs au sein de grandes institutions publiques et des petits producteurs qui aspirent à devenir des multinationales, le tout restant peut être de nourrir notre cerveau avec des bons contenus savoureux et dont on connaisse la provenance, le producteur et de partager cette dégustation avec les plus jeunes et plus vieux d’entre nous pour conserver un rapport amical avec le genre informatique.
Benjamin CADON / Labomedia – Licence CC by-SA
Annexe Jeu – Concours :