Rencontre avec l’Atelier Partagé de Digne-Les-Bains

Afin d’échanger autour des pratiques et usages d’un Atelier Partagé, nous avons rencontré Christophe Lucarz, co-fondateur de celui de Digne-Les-Bains.

« La problématique c’est d’éviter de gaspiller, de jeter, essayer de recycler au maximum. Et puis ça coûte cher de racheter. Le projet a vraiment un but écologique et financier. »

Après plusieurs expériences dans le milieu associatif autour de l’idée d’autonomie, Christophe a co-créé l’Atelier Partagé, avec Thierry Michel une association qui propose des rendez-vous mensuels dédiés au bricolage ou à la réparation en coopération dans l’agglomération de Digne-Les-Bains, dans le département des Alpes-de-Haute-Provence. L’Atelier Partagé s’inscrit fortement dans une démarche d’éducation populaire : reprendre le contrôle sur notre environnement, sur les objets que l’on utilise, partager les expériences et savoirs-faire…

Une fois par mois, les membres de l’association se réunissent en apportant outils et objets à réparer. Les rencontres ont lieu dans des locaux prêtés par une autre association dignoise. Les outils, les connaissances et les compétences de chacun sont mutualisés dans le but de diagnostiquer puis, si possible, réparer, dans la convivialité : « On a instauré ça de manière régulière, donc tous les premiers samedis de chaque mois on fait un atelier de réparation où les gens viennent avec leurs trucs à réparer et on répare tous ensembles. Les gens qui savent un peu bricoler montrent aux autres. On fait ça sur une demi-journée, plus un petit apéro à la fin. ». Les rencontres sont donc axées sur la réparation, mais l’Atelier Partagé est plus globalement un espace de bricolage, de découvertes de domaines techniques divers. Des ateliers thématiques sont parfois proposés : fabrication de meubles en palettes, entretien des skis, initiation à l’électricité, à l’électronique… Christophe parle de « micro-formations » : « Le but c’est d’acquérir les bases de chaque domaine pour pouvoir se débrouiller après. Par exemple on a fait un atelier sur le thème de l’électricité. Une ampoule à changer, ou un fusible qui casse il y a des gens qui savent pas du tout comment s’y prendre. Du coup on a installé un circuit électrique en expliquant comment ça marche… ».

L’Atelier s’adresse à tout le monde, et sa fréquentation varie entre une quinzaine et une trentaine de participants. Il y a des habitués, et d’autres personnes qui viennent juste une fois ; des membres très impliqués d’autres moins. « On propose une adhésion à 10€. Le but c’est d’avoir le plus de gens possibles aux ateliers, et ensuite par mail on fait des appels à cotisation régulièrement. On a pas des frais énormes donc une vingtaine d’adhérents ça permet de boucler le budget. Par contre on a une grande liste de diffusion, de 150 personnes à peu près. Là par contre dès qu’on peut on inscrit les gens sur cette liste, sur laquelle on balance tous les mails, toutes les infos. »

L’association fonctionne de manière collégiale : « tout le monde fait tout ». Il n’y a pas de positions hiérarchiques au sein du bureau. Les membres de celui-ci organisent des réunions accessibles aux adhérents (chez quelqu’un ou dans des locaux d’associations-amies) ; des thématiques d’activités et des projets spécifiques peuvent y être proposés. Un espace permettant de donner ou récupérer des objets est par exemple en cours d’aménagement dans une ancienne cabine téléphonique de la ville.

Une outil-thèque a été mise en place dernièrement. En effet, on n’utilise pas tous les jours sa perceuse ou son fer à souder : pourquoi ne pas faire circuler ces outils qui peuvent servir à tout le monde ? Les adhérents inscrits à l’Atelier Partagé ont donc accès à une plateforme en ligne qui permet de mettre en relation des personnes proposant un outil et celles et ceux souhaitant l’emprunter.  Une bonne idée qui pourrait être mise en place à Nantes.

Les différents outils et projets de l’Atelier Partagé participent à la création d’un « groupe » de personnes échangeant sur le plan technique et relationnel autour d’une même problématique (mieux connaître ce qu’on utilise au quotidien, et s’autonomiser dans la gestion de notre vie « matérielle »). Les rendez-vous où chacun amène ses outils et ses objets, l’organisation de projets annexes, le fait d’avoir des lieux de rencontre changeants, l’outil-thèque disponible en ligne, l’organisation non-hiérarchique, le budget réduit : tout cela permet à l’association d’avoir une forte activité en dehors des temps de rassemblement organisés. L’Atelier Partagé ne se définit pas seulement comme un lieu ou un moment, c’est un point de départ, une porte d’entrée vers la constitution individus plus autonomes. Le but n’est pas de développer l’association en elle-même ni de faire les choses de manière sérieuse ou professionnelle. Même si dans les faits il est peut-être difficile de fédérer les gens autour de ces idées, de déléguer, de faire en sorte que les membres de cette « communauté » s’approprient et fassent évoluer les outils proposés, l’Atelier Partagé constitue peut-être un premier pas vers le changement du rapport que l’on entretient avec nos objets et notre environnement. Que l’on souhaite avoir ces pratiques là au quotidien, ou juste réparer un objet ou utiliser un outil de manière ponctuelle, on peut y trouver son compte. Les adhérents et visiteurs côtoient cette association comme ils le souhaitent : elle peut constituer un moyen de changer réellement ses habitudes de consommation, autant qu’un espace plus informel de loisir et de rencontre.

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